mardi 1 août 2023

L’influence des borderlines sur le bien être au travail des collègues : comprendre et agir ?


Lors de situations de victimisation au travail (répétition systématique d’une position de victime sans lien avec la réalité de l’environnement professionnel), on peut repérer que 30% minimum de ces situations sont en lien avec des personnalités borderlines. Or, l’on considère que cela représente 2% de la population générale active. Il y a donc un phénomène de sur présentation des boderlines dans le phénomène de victimisation, avec souvent une plainte exprimant le désir d’aller au tribunal pour faire payer ses "pseudo agresseurs". 

 

Que quoi parle t-on ? 


Ce trouble stable de la personnalité se caractérise par une sensibilité extrême aux offenses interpersonnelles perçues, une perception instable du Soi, des émotions intenses et volatiles et un comportement impulsif.

 

Quels effets sur l’entourage social des personnalités borderline ? 

 

Plusieurs études montrent un effet négatif intense sur les conjoints des personnalités borderline, équivalent à être en couple avec un schizophrène.  Une étude de 2009 est très éclairante. Elle indique à la fois un énorme sentiment de « fardeau » plus important que pour d’autres personnes aidantes, une altération du bien être pouvant conduire à des troubles psychologiques, voire à un stress post traumatique, et enfin, des tensions interpersonnelles élevées avec la personne borderline et avec le reste de l’entourage social. (1)

Les personnalités borderline peuvent avoir tendance soit à aller vers personnes toxiques ou à s’attacher à des personnes empathiques et stables qui devront servir de soutien à leurs troubles. Ce sont elles qui vont souffrir le plus (2) Des résultats similaires ont été retrouvés sur les amis de jeunes personnes borderlines (3). Une étude récente démontre également l’impact négatif pour les parents (4) et plusieurs autres sur les infirmières psychiatriques accompagnant ces personnes (5)


Au travail ? 

Malheureusement, il n’existe pas d’études similaire en milieu du travail. On sait surtout que les personnes au travail avec une personnalité borderline ont des difficultés importantes au travail, soit relationnelles, soit de performance et d’absentéisme (6)

 

En faisant une synthèse de la situation on peut faire l’hypothèse que l’entourage professionnel peut vivre : 

·      Une sur solicitation émotionnelle pour soutenir la personne, y compris avec la culpabilisation et une hypersensibilité relationnelle

·      Des difficultés de performance et de l’absentéisme, notamment pour se concentrer sur des tâches complexes ou pour avoir l’énergie nécessaire au travail

·      Des plaintes régulières de ne pas être reconnue et appréciée à sa juste valeur

·      Soit de la colère, soit des retraits sociaux excessifs vis-à-vis des collègues

·      Des déclenchements exagérés de plaintes RPS ("on me harcèle") 

 

Comment agir ? 


On peut noter que les RH et managers ne sont pas formés sur comment gérer ce type de situation alors que des solutions existent notamment pour aider la personne à exprimer autre chose que de la victimisation au travail. 

 

·      Mieux comprendre ce trouble et les conséquences,

·      Identifier ce qu’il faut faire/ne pas faire pour aider la personne ou se protéger. Le fait d'avoir une charte du respect peut aider,

·      Soutenir et accompagner l’entourage professionnel, y compris en priorité le management et vérifier les éventuels effets sur le bien-être de l’équipe,

·      Définir une ligne rouge sur ce qui détermine un « ca va trop loin ». Le juge de paix en entreprise c'est l'efficacité, c'est à dire : 1) atteindre les objectifs de performance qui sont demandés 2) favoriser la coopération d'équipe, et donc ne pas dégrader la climat de travail



Pour aller plus loin ? 




 


Matthieu Poirot (www.midori-consulting.com)

Psychologue et Docteur en Gestion

Expert en psychologie des organisations

Dernier livre : Développez votre leadership positif (Vuibert)


Sources: 


 

1)   Bouchard, S., Sabourin, S. Borderline personality disorder and couple dysfunctions. Curr Psychiatry Rep11, 55–62 (2009). https://doi.org/10.1007/s11920-009-0009-x

2)   Bouchard, S., Sabourin, S., Lussier, Y. and Villeneuve, E. (2009), Relationship Quality and Stability in Couples When One Partner Suffers From Borderline Personality Disorder. Journal of Marital and Family Therapy, 35: 446-455. https://doi.org/10.1111/j.1752-0606.2009.00151.x

3)   Seigerman, M.R., Betts, J.K., Hulbert, C. et al. A study comparing the experiences of family and friends of young people with borderline personality disorder features with family and friends of young people with other serious illnesses and general population adults. bord personal disord emot dysregul 7, 17 (2020). https://doi.org/10.1186/s40479-020-00128-4

4)   Guillén V, Bolo S, Fonseca-Baeza S, Pérez S, García-Alandete J, Botella C and Marco JH (2023) Psychological assessment of parents of people diagnosed with borderline personality disorder and comparison with parents of people without psychological disorders. Front. Psychol. 13:1097959. doi: 10.3389/fpsyg.2022.1097959

5)   WOOLLASTON, K. and HIXENBAUGH, P. (2008), ‘Destructive Whirlwind’: nurses' perceptions of patients diagnosed with borderline personality disorder. Journal of Psychiatric and Mental Health Nursing, 15: 703-709. https://doi.org/10.1111/j.1365-2850.2008.01275.x

6)   Juurlink, T.T., Lamers, F., van Marle, H.J.F. et al. The role of borderline personality disorder symptoms on absenteeism & work performance in the Netherlands Study of Depression and Anxiety (NESDA). BMC Psychiatry 20, 414 (2020). https://doi.org/10.1186/s12888-020-02815-6

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