Février 2017
Le coaching
a trouvé un certain écho en France ces dernières années. De nombreux
intervenants aux profils et approches différentes proposent désormais leurs
services aux petites, moyennes et grandes entreprises. Que peut-on attendre du
coaching ? Quelles sont ses différentes approches ? Et comment
choisir un coach parmi l’offre pléthorique ? Matthieu Poirot, psychologue
social et docteur en gestion, auteur et dirigeant du cabinet Midori Consulting
nous donne des éléments de réponses grâce à sa vision du coaching.
Les
différents types d’interventions
Il y a toujours à minima une réunion tripartite au démarrage d’une intervention de coaching entre le demandeur, le coaché et le coach où l’on fixe les objectifs de l’accompagnement et les indicateurs de réussite. Et une réunion à la fin de l’accompagnement pour mesurer l’atteinte des objectifs.
Ensuite le format d’intervention
peut être collectif ou individuel. Les demandes pour les interventions
collectives concernent majoritairement des situations dégradées : lorsque
des collaborateurs, voir des membres d’un CODIR n’arrivent plus à travailler
ensemble, sont démotivés ou en situation de conflit par exemple.
Les demandes peuvent aussi arriver
plus en amont d’un problème, dans une optique préventive. Le travail consistera
alors moins à « réparer » les dysfonctionnements mais plutôt à
souligner les forces et valoriser les fonctionnements « positifs » ou
efficaces du collectif pour continuer à capitaliser dessus. Dans ce genre de
cas, l’apport de la psychologie positive est très utile.
En ce qui concerne les
accompagnements individuels, ils peuvent intervenir pour plusieurs types de
demandes. Nous accompagnons beaucoup les évolutions de carrière au moment de la
prise de poste comme les passages vers une activité managériale ou de
dirigeant. Nous travaillons à trouver l’équilibre entre la performance
nécessaire à ces nouvelles fonctions et le bien être. L’aspect bien être
est indispensable notamment pour apprendre à se protéger car les périodes
d’évolution professionnelle sont des périodes sensibles et sujettes au burnout.
Cela est encore plus vrai pour les hauts potentiels qui accèdent à un certain
pouvoir et qui sont très peu habitués à l’échec auquel ils n’ont rarement eu à
faire face.
L’accompagnement individuel des dirigeants
est très bénéfique pour les entreprises. Ils n’ont en général que très peu de
feedbacks sur leurs comportements car plus ils grimpent dans l’organigramme,
plus les collaborateurs s’adaptent à eux et ce qu’ils sont. Et si leur travers
comportementaux ne sont pas « maitrisés » ils peuvent alors impacter
négativement leurs collaborateurs. La récente élection de Donald Trump nous
fournit un bon exemple en la matière. La prise de poste est donc un moment
opportun pour les aider à adopter des comportements sains et apprendre à
laisser de côté la tentation de jouer le rôle du super héros.
Certains accompagnements individuels
ont pour but la gestion de situation humaine difficile. Par exemple, nous
pouvons accompagner un manager qui se questionne sur la manière de se comporter
avec un collaborateur en pleine décompensation psychique au travail. En
général, ces interventions sont rapides et permettent de fournir des réponses
en deux ou trois séances.
Nous développons aussi le coaching
de « résilience » pour les hauts potentiels. Le terme
résilience me parait primordial car il induit un aspect solution qui écarte le
processus de victimisation dans lequel un « coaché » peut s’enfermer
en rentrant dans une démarche d’accompagnement. Dans ce genre de cas,
nous pouvons proposer des cessions interentreprises pour favoriser l’échange
entre les personnes en difficultés.
Enfin, on fait également appel à
nous lorsque les managers produisent des comportements inefficaces : un
manager trop gentil, trop perfectionniste ou qui a du mal à déléguer par
exemple.
Globalement, j’observe que le retour
sur investissement est considérable. Huit à dix séances de travail sur des
micros-comportements permettent d’anticiper la dégradation de situations à
forts impacts. Plus une personne monte dans la hiérarchie, plus la différence
se fait sur son comportement.
Les demandeurs
La fonction RH est évidemment très
souvent impliquée, en général, les sollicitations proviennent des services RH
ou du DRH lui-même. Ils arrivent parfois que les dirigeants nous adressent
directement leur demande. Il y a beaucoup de demande dans les grandes
entreprises et très grandes entreprises du CAC40, ces pratiques sont bien
implémentées. Pour les TPE et les PME, les interventions se font souvent en
période de crise quand ils n’ont plus d’autres solutions. La culture du
coaching n’est pas encore très établie. C’est particulièrement vrai pour les
entreprises familiales qui sont des terrains d’interventions très complexes et
qui ne sont pas conseillés aux débutants.
Selon moi, certains secteurs
gagneraient à utiliser ces approches. Je pense notamment au secteur hospitalier
où l’encadrement rencontre beaucoup de difficultés et au milieu académique où se
faire aider est culturellement très difficile car on y retrouve beaucoup de
croyances du type « nous sommes suffisamment intelligents » et
n’avons pas besoin de conseil.
Le choix du coach
Le marché des coachs est un marché peu régulé. Beaucoup d’intervenants proposent leurs services avec des profils et des pratiques très hétérogènes. Selon moi il y a plusieurs critères à prendre en considération pour choisir son coach:
-
Les références : le coach doit
pouvoir être en mesure de fournir des références et vous donner la possibilité
de vous renseigner auprès de ces anciens clients.
-
Une formation en sciences
humaines : une formation de sociologue ou de psychologue permet d’avoir
des connaissances indispensables sur l’humain et son fonctionnement
psychologique et social.
-
Une connaissance du monde de
l’entreprise : la connaissance du monde de l’entreprise est primordiale,
certains coachs avec des formations de psychologue ont des approches trop
thérapeutiques qui n’apportent pas de réponses suffisamment adaptées au
contexte.
-
La certification : ce point est
à prendre avec plus de recul. Beaucoup d’écoles proposent des formations
certifiantes et la question se pose de savoir qui certifie le certificateur.
-
Enfin, des compétences
professionnelles et personnelles telles que la qualité d’écoute, la capacité
d’adaptation, le pragmatisme, la souplesse et la connaissance de ses propres
limites. A cette liste, j’ajouterais l’humour qui peut s’avérer une qualité
utile et démontrer une certaine capacité
à prendre de la distance.
Les limites du coaching ?
Lorsqu’il s’agit d’un problème
organisationnel le coaching n’est pas adapté. Parfois nous avons des demandes
d’accompagnement de manager à qui il manque la moitié de leur effectif et pour
qui le coaching n’est pas une solution. D’autre fois, le problème est plus de
nature systémique et dans ces cas là une intervention de coaching n’apporte
rien non plus, mais plus une intervention de médiation. Selon moi, il est
nécessaire de réaliser un mini diagnostic avant une intervention pour savoir
quelle boîte à outils utiliser. Les multiples casquettes de psychologue, coach
et consultant facilitent alors le choix de la technique la plus adaptée à la
situation.
Il faut
également se méfier des approches en surface. Avec l’expérience, je suis de
plus en plus convaincu qu’il faut aussi explorer la partie sombre des leaders
pour voir ce qu’on peut en extraire comme lumière, pour trouver des moyens de
les aider. Se limiter à la surface ne fait que consolider les faux semblants.
C’est l’un des risques majeur des programmes de développement du
leadership proposés par certains grands groupes.
Matthieu Poirot
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